Le sujet de l’autonomie des véhicules électrique génère beaucoup d’intérêt et de discussions. Celui de la 225xe n’échappe pas à cette tendance. Les néophytes ont du mal à s’y retrouver, d’autant plus que les avis d’experts sont parfois contradictoires. Plus particulièrement, l’autonomie affichée cause bien des soucis. Comme les questions continuent sur ce sujet important, j’ai décidé de compiler mes commentaires dans cet article de synthèse qui devrait répondre à de nombreuses interrogations.

[English Summary| So what is the true range of a BMW 225xe? Why is the displayed range so low? Driving the announced 41 km (now over 50 km with the new battery!) exclusively on a single electric charge is a rare feat and some users can get concerned when they see significantly lower numbers being displayed by their vehicle. This article clarifies some of the number we see on the dashboard and shares a practice to establish the ultimate range of your vehicle. It requires an hour and some discipline, but it will provide you with reliable indicators, especially if you are willing to repeat these cycles from time to time.

Les fondamentaux

La BMW 225xe a été commercialisée en 2016 en annonçant une autonomie de 41 km en électrique, et rares sont ceux qui sont parvenus à atteindre cette valeur (les lecteurs du Blog le savent, je les ai atteints!). Pire, le système affiche automatiquement l’autonomie estimée, et c’est [presque] toujours inférieur à 41 km, parfois très inférieur: 26 km, voire moins encore. C’est notamment ce qui génère de l’inquiétude à propos du véhicule et des questions fréquentes sur ce Blog. Voyons dans une premier temps d’où viennent ces valeurs, comment il faut les comprendre et si on peut réellement les comparer. Notez au passage que les valeurs numériques concernent la première première batterie Haute Tension (capacité totale de 7.7 kWh, dont seuls 5.7 kWh sont accessibles), mais les principes qui suivent s’appliquent également à la nouvelle ou à toute autre d’ailleurs.

Autonomie « constructeur » de 41 km

Cette valeur provient d’essais sur banc qui sont règlementés et suivent une procédure stricte. En l’occurence, il s’agissait du cycle NEDC (New European Driving Cycle). Comme tous les cycles de ce type, il enchaîne les accélérations et les décélérations avec des vitesses stabilisées autour des vitesses moyennes de ville et de parcours extra-urbain de façon à produire une valeur moyenne de consommation qui devrait être un bon indicateur pour comparer différents véhicules.

Rappelons que pour la capacité effective de la batterie de 5.7 kWh, les 41 km d’autonomie annoncés par le constructeur correspondent à une consommation moyenne de 14 kWh/100 km. Selon mes propres relevés de consommation sur trajets courts (j’appelle trajets courts ceux que l’on peut faire sans aucune assistance de la motorisation thermique) ma moyenne s’établit à 16.5 kWh/100 km, ce qui devrait correspondre à une autonomie de 35 km. Ce n’est pas tout à fait exact, car lorsque la charge de la batterie descend à 7% (BMW informe que ce pourcentage est variable suivant les conditions), le mode MAX eDrive n’est plus disponible et le moteur thermique va s’animer: en dessous de 7% de charge, le moteur électrique n’intervient seul que sur des efforts vraiment peu importants, mais généralement en complément du moteur thermique. A de nombreuses reprises, j’ai effectivement constaté 33 km parcourus jusqu’à 7% de charge.

C’est décevant de perdre ces derniers kilomètres, mais il y a derrière ce choix du constructeur un souci d’optimisation: l’idée est de faire chauffer le moteur thermique avant qu’il ne soit trop sollicité, afin de lui permettre de se rapprocher de la plage de température sur laquelle il sera plus efficace.

Si l’on tient compte de ces 7% « perdus », la capacité utile de la batterie chute à 5.3 kWh si bien que la consommation moyenne devrait tomber à moins de 13 kWh/100 km pour pouvoir parcourir les 41 km annoncés sans avoir recours au moteur thermique – ça devient franchement difficile… Le rayon d’action effectif de la 225xe n’est donc que de 16 km aller sans recharger la batterie en cours de route. Par contre, chaque demi-heure de charge sur une prise normale vous donnera environ 5 km d’autonomie supplémentaire jusqu’à atteindre 80% de charge. Avec une borne de 3.7 kW, vous gagnez environ 60% de puissance de charge ce qui se traduit par un gain proportionnel d’autonomie ou de temps.

Ah, oui, n’oublions pas que l’autonomie maximale est atteinte sans actionner les accessoires. En particulier, pas de chauffage! Même dans le Midi, ça peut être désagréable en hiver et j’ai aussi fait des tests d’autonomie « sans compter », c’est à dire avec le chauffage, pour voir jusqu’où ça descend. Résultat: entre 20 et 28 km.

Les 41 km de BMW ont été obtenus sur cycle NEDC. Comme ce cycle correspond à un parcours de 11 km, je suppose qu’ils mesurent la consommation électrique sur le cycle et qu’ils extrapolent l’autonomie sur la base de 5.7 kWh disponibles, mais je n’en suis pas certain, et je ne sais notamment pas si les 7% de « réserve » sont déduits ou non.

Dernier point important: la performance d’une batterie Li-ion varie fortement avec la température ambiante: la capacité et les performances en général augmentent avec la température. Les valeurs sont généralement mentionnées à 25 °C; si la température est inférieure, vous ne parviendrez pas aux meilleurs résultats. Si la température ambiante est vraiment basse, disons proche de 0 °C, attendez-vous à une forte diminution de l’autonomie électrique: 10 km de moins n’est pas un mauvais ordre de grandeur.

Autonomie affichée

L’autonomie affichée est forcément une estimation, puisque cet indicateur essaie de prévoir la distance que vous allez pouvoir parcourir. Or cette distance dépend de l’état de charge de la batterie, bien sûr, mais aussi de la consommation moyenne de vos prochains kilomètres. Même si l’état de charge de la batterie était parfaitement connu par le système BMS (Battery Management System, un calculateur intégré à la batterie qui mesure de nombreux paramètres de fonctionnement et dispose d’une logique de gestion), comment l’ordinateur de voyage peut-il estimer votre consommation moyenne? Une solution consiste à utiliser vos consommations récentes, et de faire des moyennes pondérées: on fixe l’intervalle de calcul (par exemple, les 20 derniers kilomètres parcourus), on donne un peu plus de poids aux (6?) derniers kilomètres, un peu moins aux (10?) kilomètres suivants et encore moins aux (4?) premiers. J’ai mis des points d’interrogation car je ne sais pas comment BMW fait ces calculs. Mais c’est le principe.

Bien entendu, cette moyenne évolue à mesure que vous roulez. Faites 20 km de descente et vous verrez des valeurs d’autonomie augmenter à mesure que vous roulez pour dépasser 50 ou même 60 km! Mais gravissez un col raide et l’autonomie calculée s’effondrera. C’est exactement la même chose pour un moteur thermique. La grosse différence, c’est que même avec notre « petit » réservoir, on fait beaucoup de kilomètres avec 36 L d’essence. Que l’on soit à 5.5 L/100 km ou momentanément à 11 L/100 km au cours d’un trajet de 100 km, vous verrez la consommation moyenne augmenter, mais lentement et donc l’autonomie thermique calculée ne sera que peu affectée. Mais faites l’essai avec quelques litres d’essence dans le réservoir seulement en remettant tous les calculs de moyenne à 0 et vous verrez le résultat. Enfin, pas vraiment, parce que c’est justement pour ça que les calculateurs arrêtent d’afficher les autonomie quand il ne reste pas un volume suffisant de carburant: les erreurs deviennent tellement importantes que le calculateur vous dira simplement qu’il est temps d’aller faire le plein. Or c’est bien là le problème, car à autonomie comparable, évaluer les kilomètres que l’on pourra parcourir avec 5.3 kWh d’énergie électrique disponible, c’est un peu comme si on essayait de le faire pour 2 ou 3 litres d’essence; vous voyez le problème?

Mais n’oublions pas, au final, l’objectif de l’autonomie affichée: il ne s’agit pas de vous fournir un indicateur de la santé de la batterie, mais plutôt une estimation de ce que vous êtes quasiment certain de pouvoir parcourir dans les conditions semblables aux derniers kilomètres. On peut comprendre que l’indicateur soit plutôt prudent: que diriez vous s’il affichait 39 km mais que les conditions de conduite ne vous permettent pas de dépasser 32 km, et ce systématiquement? Et c’est bien le cas, car le plus souvent, on est bien loin des conditions NEDC (WLTP aujourd’hui).

C’est quand même utile!

Je vous ai peut-être fait peur avec tout ça, et vous vous dites probablement que ces affichages sont complètement faux et ne servent à rien. Ce n’est pas le cas! L’autonomie affichée reste un indicateur utile, mais c’est comme tout: il faut savoir ce qu’il représente pour bien l’utiliser. J’utilise l’autonomie affichée comme un indicateur qualitatif qui me renseigne sur mon style de conduite autant que sur le type de parcours effectué. Lorsqu’il s’agit du même parcours, seuls les conditions et le style de conduite varient, et on peut comparer la consommation en connaissance de cause, avec également une meilleure appréciation de la fiabilité de l’autonomie affichée.

Les indicateurs qui me paraissent plus utiles sont les valeurs de consommation (moyenne et instantanée), à condition de remettre la moyenne à 0 avant de débuter un parcours que vous voulez évaluer.

Mais ce qui vous inquiète avant tout, ce sont ces « 29 km » d’autonomie qui s’affichent obstinément alors qu’on vous a promis 40 ou 50 km d’autonomie. Que faire? Si vous voulez juste voir l’autonomie affichée augmenter, c’est simple: levez le pied, faites des parcours plats ou en descente, n’utilisez ni chauffage ni climatisation, rechargez le véhicule au bas de la descente et non après une montée. Faites les relevés quand il fait plus de 20 °C. Ou faites-vous carrément plaisir: une trentaine de kilomètres de descente vous donneront les valeurs souhaitées (mais ne comptez pas sur l’autonomie affichée pour le parcours retour). Mais si ce qui vous intéresse c’est l’autonomie réelle de votre véhicule, il faut la mesurer vous-même. Voyons comment s’y prendre.

Une mesure d’autonomie fiable

Pour s’y retrouver et connaître l’autonomie réelle de votre véhicule, il faut mesurer la distance parcourue entre 100% et 7% de charge. Plaçons-nous dans le cas où nous voulons utiliser cette valeur pour caractériser la batterie (ai-je perdu de la capacité ou non?) et pour comparer l’autonomie à celles obtenues par d’autres utilisateurs, Dans ce cas, il faut choisir un parcours qui va permettre d’éliminer l’effet de paramètres très influents (la dénivellation est primordiale), ou de préciser les circonstances de l’essai de façon objective ou délibérément favorable (la température ambiante). Voici les conditions principales à respecter.

Première condition: le parcours doit présenter zéro dénivelé en moyenne: l’altitude des points d’arrivée et de départ doivent être les mêmes. Ce n’est pas si simple qu’il y paraît.

Deuxième condition: le trafic doit être fluide, en limitant les carrefours, les feux de circulation, les aléas divers qui modifieront votre style de conduite ou votre vitesse moyenne en imposant freinages et accélérations.

Troisième condition: roulez de la façon la plus douce possible. Chaque ralentissement va compter, chaque accélération. Surtout, utilisez le récupérateur d’énergie pour ralentir, pas vos feins à disques! Je sais, ça n’est pas forcément représentatif des conditions normales pour la plupart – mais on est là pour connaître la capacité ultime du véhicule, pas pour se voir confirmer qu’en roulant « comme d’habitude » on risque de ne pas dépasser 29 km!

Je vous invite à relire l’article dans lequel je relatais l’évènement des 41 km parcourus. Voici quelques précisions supplémentaires sur la façon dont je m’y suis pris. Je suis parti de chez moi la batterie chargée à 100%, à une heure où il y a peu de circulation. J’ai relevé la température ambiante (28 °C) et j’ai roulé avec l’intention de parcourir le maximum de kilomètres! Je m’attendais à faire plus de 35 km, donc j’ai repéré un parcours qui me permettait de me retrouver proche du point de départ au bout de 35 km. De cette façon, pas de dénivelé. Arrivé à ce point, j’ai constaté qu’il me restait bien plus de capacité que les 5% environ que je consomme pour arriver à la maison. J’ai donc poursuivi le trajet entre deux ronds-points distants de 400 m. Plusieurs allers-retours m’ont permis de baisser la capacité à environ 10% – c’était le moment de rentrer. Voyant 40 km approcher, j’ai roulé très lentement en me disant que 41 km étaient peut-être à portée. Je suis arrivé à 200 m de la maison quand le moteur thermique s’est enclenché; la batterie affichait 3% de capacité. 41 km parcourus! Un chiffre utile à retenir: la consommation moyenne affichée pour ce parcours exceptionnel était de 13.1 kWh/100 km.

Conclusion

L’autonomie affichée n’a qu’une valeur relative, elle ne devrait pas vous inquiéter. Pour connaître l’autonomie réelle de votre véhicule en mode électrique, faites un parcours en boucle, sans dénivelé net, en essayant de battre un record. Mettez-vous dans les meilleures conditions possibles; la température devrait être de plus de 20 °C, voire 25 °C si possible. C’est le seul moyen pratique de connaître son potentiel et de comparer des véhicules. Refaites ce même parcours de temps en temps. Le reste du temps, observez vos consommations moyennes et instantanées (kWh/100 km) pour juger de votre efficacité et estimer votre autonomie. Ce sera plus fiable que ce qu’affiche l’indicateur l’autonomie, qui lui reste utile pour vous indiquer l’impact des conditions de et de votre style de conduite.

Quand le déconfinement vous le permettra, faites donc quelques boucles d’autonomie et dites-nous en commentaire ce que vous avez obtenu.

Soyez prudents, restez en bonne santé.

Amicalement,

JL